Les Jeux olympiques d’hiver de Beijing 2022 et l’esprit olympique s’installent en terre chinoise en ce mois de Nouvel An lunaire. Ils marqueront notamment l’aboutissement réussi d’une coopération sino-française dans le domaine de l’économie de la montagne, initiée dès 2015 lors de l’attribution des Jeux à Beijing. En 2017, la région Rhône-Alpes avait mis toutes les chances de son côté face à ses concurrents suisses, autrichiens ou italiens en envoyant une délégation de plus de seize entreprises au French village du salon spécialisé Alpitec China – ISPO Beijing. Les compagnies alpines voient au-delà des JO, car le potentiel est énorme. Comme le disait Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes lors d’un voyage dans la province du Hebei : « L’enjeu est évidemment considérable et le potentiel est délirant […] Les Chinois entament ce qu’on a accompli dans les années 1970 (dans les Alpes, NDLR). Cela force le respect. »
L’esprit olympique brille de mille feux en Chine lors des Jeux olympiques d’hiver de Beijing 2022.
La Chine rattrape cependant son retard à vitesse grand V et recense aujourd’hui plus de 1 000 stations pour 20 millions de skieurs, soit une augmentation de 490 % du nombre de stations. Les complexes affichent en moyenne une progression de 30 % du nombre de clients depuis huit ans. Et ce, sans compter les 45 pistes artificielles et ses 350 000 visiteurs annuels ni les 400 simulateurs drainant 780 000 visiteurs chaque année. La Chine prévoit de devenir le premier marché des sports d’hiver d’ici à 2025.
Le nombre de skieurs en Chine est passé de 10 000 en 1996 à 20 millions en 2020. Une croissance qui s’est maintenue à 6 % entre 2019 et 2020. Progression gigantesque, mais pas encore à la hauteur des espérances du gouvernement chinois qui, avec l’attribution, en 2015, des Jeux olympiques d’hiver à la Chine, s’en est mêlé. Le marché du ski devrait peser 3,5 milliards d’euros en 2022, soit une augmentation de 480 % depuis 2015. Le marché du snowboard, quant à lui, touche 400 000 consommateurs principalement pékinois et continue à prendre de l’ampleur. La marque Burton, par exemple, a réalisé un chiffre d’affaires de 15,5 millions d’euros sur la saison 2020 et prévoit une croissance de 30 % d’ici à 2022.
Le fabricant de transport par câble POMA profite déjà de l’essor des commandes de télésièges et télécabines : sur cinq à dix projets qu’il entame chaque année en Chine, trois concernent des stations de ski. L’entreprise iséroise est engagée dans la super station de Thaïwoo, un projet d’une dizaine d’années située dans l’actuelle zone olympique de Zhangjiakou. La Chine part de rien dans le secteur, mais elle veut voir grand avec plus de 200 pistes et 45 remontées mécaniques. De son côté, la Compagnie des Alpes (CDA), basée à Chambéry (Savoie), numéro 1 mondial de l’exploitation de domaines skiables, a signé un contrat d’assistance pour l’exploitation de Thaïwoo.
De nombreux visiteurs profitent des plaisirs des sports d’hiver dans une station de ski à Chongli, dans la province du Hebei, le 12 décembre 2020.
Autre acteur incontournable, la Compagnie des Alpes, propriétaire en France de onze domaines skiables réputés (entre autres Tignes et Méribel) a paraphé un protocole d’accord avec Thaïwoo en vue d’intensifier leur coopération entamée depuis 2015. Elle participe à la conception des pistes, aide à améliorer la qualité du damage et joue les intermédiaires avec des partenaires français pour mettre sur pied des formations de ski, ainsi que des équipes de moniteurs et de secouristes.
Enfin, le Groupe Rossignol, leader du ski français, a conclu un accord avec IDG Capital, première société d’investissement étrangère en Chine. Un rapprochement qui est venu renforcer la stratégie de croissance des marques du groupe sur le marché chinois, avec pour objectif d’y devenir la marque de référence des JO 2022 de Beijing. Rossignol est très présent en Chine avec l’organisation de compétitions pour que les jeunes skieurs chinois s’identifient aux champions notamment. L’équipe de ski alpin chinoise sera équipée en skis Rossignol pour les épreuves de descentes et de combinés. L’équipement à lui seul représenterait 16 milliards de yuans, soit 2,1 milliards d’euros à l’horizon 2025. Une opportunité considérable pour le Groupe Rossignol qui poursuit sa quête de la meilleure expérience en proposant la meilleure gamme de produits de sa catégorie, à ses clients du monde entier.
L’athlète chinoise Ni Yueming en plein effort, lors du slalom géant féminin, le 7 février. Cette épreuve olympique s’est tenue au Centre national de ski alpin de Yanqing.
Alors que certains pays anglo-saxons s’étaient mobilisés pour un boycott diplomatique des Jeux olympiques, la France était bien là. Une présence qui l’honore, pour les valeurs de l’olympisme qu’elle représentera en 2024, mais aussi et surtout pour les milliers d’emplois du secteur dans les années à venir. Ces JO constituent un enjeu économique majeur pour les entreprises de Rhône-Alpes qui concentrent à elles seules 120 000 des 150 000 emplois de la filière française. La région a ainsi signé des accords de coopération sur dix ans avec le Hebei, Yanqing et Zhangjiakou pour favoriser des partenariats gagnant-gagnant avec les acteurs économiques de ces territoires.
*ADRIEN MUGNIER est directeur de l’Observatoire français des Nouvelles Routes de la Soie (OFNRS).