Chine-France

Les relations Chine-France et Chine-UE évolueront vers le mieux
By CUI XIAOQIN et MA LI, membres de la rédaction | Dialogue Chine-France | Updated: 2023-03-14 10:45:00

Lu Shaye, membre du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois et ambassadeur de Chine en France 

Le 7 mars 2023, Lu Shaye, membre du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois et ambassadeur de Chine en France, a accepté un entretien exclusif avec La Chine au présent sur des sujets d’actualité concernant les relations sino-françaises et sino-européennes. Selon lui, dans les nouvelles conditions historiques, la Chine, la France et l’UE doivent, dans un esprit de dialogue et de coopération, de paix et de stabilité, d’ouverture et de gagnant-gagnant, rechercher des terrains d’entente en mettant de côté les divergences, surmonter ensemble les difficultés, apporter par des actions concrètes une stabilité précieuse à ce monde tumultueux. Il estime qu’en cette période post-pandémique, les relations Chine-France et Chine-UE se sont stabilisées et réchauffées, donnant un nouvel élan au développement des partenariats stratégiques globaux Chine-France et Chine-UE dans la nouvelle ère.

« Pas de conflit d’intérêts ou contradiction fondamental entre la Chine et l’UE » 

La visite du membre du Bureau politique du Comité central du Parti communiste chinois (PCC) et directeur du Bureau de la Commission centrale des affaires étrangères du PCC Wang Yi en Europe qui a pris fin en février a été sa première visite en tant que directeur du Bureau de la Commission centrale des affaires étrangères, ainsi que la première visite de haut niveau entre la Chine et la France et entre la Chine et l’UE depuis que la Chine a optimisé et ajusté sa politique de prévention épidémique. Elle montre l’importance que la Chine accorde à ces deux relations.

La coopération stratégique sino-française est depuis longtemps à l’avant-garde de la coopération entre la Chine et l’Occident. Au cours de cette visite, les deux parties ont convenu de préparer conjointement la prochaine étape des échanges de haut niveau, de renforcer la coordination stratégique en réponse aux défis mondiaux, et de poursuivre leur tradition d’indépendance sur la scène internationale. Elles ont convenu de bien organiser l’Année Chine-France du tourisme culturel et les célébrations du 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques bilatérales, d’approfondir la coopération concrète dans l’aéronautique, le spatial, l’agroalimentaire, le développement vert et les marchés tiers, et de mieux répondre aux crises alimentaire et énergétique, au changement climatique et à l’enjeu de biodiversité.

Cette année coïncide avec le 20e anniversaire de l’établissement du partenariat stratégique global Chine-UE. Au cours de la visite de Wang Yi, la Chine et l’UE ont convenu de bien préparer la réunion des dirigeants Chine-UE de cette année, de faire pleinement jouer les rôles piliers des cinq dialogues Chine-UE de haut niveau (stratégique, économique et commercial, environnemental, numérique, culturel et humain), et de défendre le multilatéralisme et le libre-échange, la stabilité des chaînes d’approvisionnement et industrielles mondiales, ainsi qu’un environnement économique et commercial international conforme au droit et aux normes.

En assistant aux activités du directeur Wang Yi et en suivant les reportages des médias chinois et étrangers, j’ai pu mesurer les souhaits des pays européens dont la France de développer leurs relations avec la Chine. Ils ont exprimé l’importance qu’ils accordent au statut et à l’influence de la Chine, leurs attentes sur le rôle de la Chine dans le monde, leur volonté de dynamiser le partenariat stratégique global Chine-UE et la coopération économique et commerciale mutuellement bénéfique, et leur espoir de voir redémarrer les échanges présentiels à tous les niveaux et les dialogues et coopération dans tous les domaines. Il est donc à prévoir que les relations sino-françaises et sino-européennes évolueront vers le mieux en cette année.

Certes, les relations Chine-UE ont connu de nombreuses difficultés au cours de ces deux dernières années, les principales raisons pouvant être résumées en quatre points. Premièrement, les États-Unis ont multiplié l’endiguement et les attaques contre la Chine, en contraignant et leurrant les alliés, y compris l’UE, à choisir leur camp. Surtout après le déclenchement du conflit en Ukraine, les États-Unis colportent à la folie la narrative « démocratie contre autoritarisme » et la propagande antichinoise avec rumeurs et mensonges à l’appui, ce qui a sérieusement induit en erreur les gouvernements européens et la population européenne. Deuxièmement, il existe une déviation de l’UE concernant comment elle décrit la Chine. L’UE considère la Chine non seulement comme un partenaire, mais aussi comme un concurrent et un rival systémique, ce qui révèle la logique opportuniste et spéculative de certains politiciens de l’UE. Ils veulent tirer profit de la coopération avec la Chine, mais également réprimer la Chine aux côtés des États-Unis. Troisièmement, certains pays et institutions de l’UE ont commis des erreurs sur des questions liées à Taiwan et au Xinjiang, portant gravement atteinte aux intérêts fondamentaux de la Chine, et la Chine a dû apporter les réponses nécessaires. Quatrièmement, l’épidémie de COVID-19 a sérieusement entravé la coopération économique et commerciale ainsi que les échanges culturels Chine-UE, ce qui n’a pas été propice aux connaissance et compréhension mutuelles.

En fait, il n’y a pas de conflit d’intérêts ou de contradiction fondamental entre la Chine et l’UE, du moins sur le plan géostratégique l’une ne constitue pas une menace pour la sécurité de l’autre. La Chine croit toujours que les relations Chine-UE portent une dimension globale et stratégique, et que les choix pris par les deux parties affectent l’évolution du monde. Dans les conditions historiques nouvelles, les deux parties doivent, dans un esprit de dialogue et de coopération, de paix et de stabilité, d’ouverture et de gagnant-gagnant, rechercher des terrains d’entente tout en mettant de côté les divergences, surmonter les difficultés ensemble, et apporter par des actions concrètes une stabilité précieuse à ce monde tumultueux.

L’année prochaine marquera le 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France. La France a toujours été une puissance occidentale unique. Après la Seconde Guerre mondiale, le général Charles de Gaulle a poursuivi une stratégie d’autonomie basée sur ses propres forces à l’intérieur et une politique étrangère indépendante à l’extérieur, osant dire « non » aux États-Unis. C’est précisément grâce à la politique étrangère indépendante de Charles de Gaulle que la France a pris l’initiative d’établir des relations diplomatiques au niveau d’ambassadeurs avec la Chine, un geste qui avait choqué le reste du monde sur fond de guerre froide, mais qui précédait aussi le retour de la France au rang des puissances mondiales. L’adhésion ferme à l’autonomie stratégique et au multilatéralisme, et la poursuite incessante de l’indépendance nationale, de la liberté et de l’égalité sont le noyau spirituel de nos deux nations, et le cœur de la singularité de nos relations bilatérales qui se placent à l’avant-garde des relations entre grands pays.

Le président Emmanuel Macron s’engage également à maintenir le statut de grande puissance de la France, à renforcer l’autonomie stratégique de l’UE, et à s’opposer à l’unilatéralisme. Nous espérons que la partie française valorisera toujours l’esprit d’indépendance, et qu’elle travaillera avec la Chine pour s’opposer à l’unilatéralisme, au protectionnisme, au « découplage » et à la « rupture des chaînes », pour relever les défis mondiaux tels que le changement climatique et la sécurité énergétique, et pour contribuer davantage à la préservation du système international centré sur les Nations Unies et l’ordre international basé sur le droit international.

« Des opportunités émergent en temps de crise, et la crise peut se transformer en opportunités » 

En tant que grand pays responsable, la Chine développe des relations amicales avec les pays du monde entier sur la base des Cinq principes de la coexistence pacifique, et promeut des pourparlers de paix dans un point de vue objectif et équitable en faveur d’un règlement rapide, pacifique et efficace de différends internationaux. Depuis que la crise ukrainienne a éclaté il y a un an, la Chine s’est toujours fermement tenue du bon côté de l’histoire, du côté de la paix et du dialogue, en favorisant la désescalade de la situation en Ukraine, et en encourageant et soutenant tous les efforts pour une résolution pacifique de la crise.

Certes, sur fond de crise ukrainienne, les relations entre l’UE et la Russie se sont dégradées. C’est quelque chose que nous ne voulons pas voir, parce que ce n’est pas bon pour l’UE, pas bon pour la Russie, et pas bon pour la paix et la stabilité mondiales. Par conséquent, la Chine a avancé 12 propositions dans un document de position sur le règlement politique de la crise ukrainienne, parmi lesquelles le respect de la souveraineté de tous les pays, le rejet de la mentalité de guerre froide, la cessation des hostilités, et l’ouverture de pourparlers de paix. C’est la réaffirmation des positions constantes de la Chine, et un effort chinois d’aboutir au plus grand consensus international en tenant compte des préoccupations légitimes des différents pays. La Chine estime que plus la situation est complexe, plus nous devons rester lucides ; plus le problème est difficile, plus nous devons persister dans le dialogue. La Chine continuera à jouer un rôle constructif en respectant la réalité des faits, à encourager et soutenir les parties concernées à n’épargner aucun effort pour la paix, et à travailler avec la communauté internationale pour explorer des solutions politiques et efficaces à la crise.

La situation internationale actuelle connaît des changements profonds et complexes. Les bouleversements séculaires se sont approfondis avec une intensité sans précédent, et les caractéristiques de la période de transition turbulente sont devenues plus saillantes. Tout d’abord, les risques géopolitiques continuent d’augmenter. La crise ukrainienne suscite l’inquiétude d’une « nouvelle guerre froide ». De multiples crises telles que celles de l’énergie et de la sécurité alimentaire ont éclaté. La tendance à la confrontation de blocs, à la fragmentation et au dérèglement émerge, et des facteurs d’instabilité, d’incertitude et d’imprévisibilité s’accumulent. Deuxièmement, le protectionnisme commercial est en hausse, la mondialisation, entravée, l’inflation, élevée, et les États-Unis sont presque paranoïaques en imposant le « découplage » et la « rupture des chaînes » avec la Chine, ce qui menace sérieusement la stabilité des chaînes industrielles et d’approvisionnement mondiales, ainsi que la reprise économique mondiale. Troisièmement, les États-Unis ont intensifié leurs répression, attaques et endiguement stratégique contre la Chine, en criant la « menace chinoise » sur fond de mentalité de guerre froide et de préjugés idéologiques, et en kidnappant d’autres pays pour servir leurs propres intérêts. L’hégémonie, l’intimidation et les agissements arbitraires sont profondément nuisibles, et mettent gravement en danger la paix et la stabilité mondiales, ainsi que le droit au développement des autres pays.

Ces changements constituent de sérieux défis pour le développement de la Chine, mais des opportunités émergent en temps de crise, et la crise peut se transformer en opportunités. Dans la situation actuelle de crise et de chaos, nous pouvons voir que les appels à la paix et au développement de la communauté internationale se font plus forts, ses attentes d’équité et de justice, plus fermes, et son aspiration à la coopération et au gagnant-gagnant, plus urgente. Les contre-courants de conflit, confrontation, endiguement et découplage sont voués à l’échec, tandis que les aspirations des peuples et la tendance de l’époque sont la paix, le développement, la coopération et le gagnant-gagnant.

« Seuls les échanges et dialogue basés sur l’amitié peuvent aplanir les divergences et aboutir à un consensus » 

La Chine et la France ont toutes deux une longue histoire avec une civilisation brillante, et sont représentatives des civilisations orientale et occidentale. Les deux peuples peuvent apprendre la langue, l’histoire et la culture de l’autre, comprendre les traditions, les valeurs et le mode de vie de l’autre, pour approfondir la compréhension et le respect mutuels. Les échanges et coopération dans l’économie, le commerce, les sciences et technologies, l’éducation et le sport y contribuent aussi. Il est indéniable qu’il existe un certain « déficit » dans la compréhension mutuelle entre nos deux peuples, encore aggravé par l’épidémie. Seuls les échanges et dialogue basés sur l’amitié peuvent aplanir les divergences et aboutir à un consensus. L’année prochaine marquera le 60e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques bilatérales, ainsi que l’Année Chine-France du tourisme culturel. Ce sera aussi l’année des JO de Paris. Les deux parties organiseront de nombreuses activités culturelles et sportives, l’occasion pour les Chinois et les Français de mieux se connaître et consolider la base sociale de l’amitié sino-française.

En tant que nouveau membre du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois, j’estime qu’en matière de promotion des échanges amicaux Chine-France et Chine-UE, l’amitié reste la tonalité fondamentale de la politique de la Chine à l’égard de l’UE, et la coopération, l’objectif général. Suite à la victoire anti-COVID-19 et à la reprise économique rapide de la Chine, la Chine, la France et l’UE attendent avec impatience de voir redémarrer la croissance, renforcer les échanges amicaux dans divers domaines, pour récupérer les trois ans perdus et porter les relations bilatérales à un nouveau niveau.

Il convient d’abord de renforcer la mobilité humaine à tous les niveaux. Il faut valoriser le rôle de pilotage de la diplomatie des chefs d’État, mener à bien les préparations de la prochaine étape des échanges de haut niveau et la conception au plus haut niveau des relations Chine-France et Chine-UE. Il faut créer les conditions pour faciliter la mobilité humaine, relancer globalement les dialogue et échanges dans divers domaines, et encourager le renforcement des échanges amicaux entre l’Assemblée populaire nationale chinoise et l’Assemblée nationale française, ainsi qu’entre la Conférence consultative politique du peuple chinois et le Sénat français.

Il convient ensuite d’approfondir la coopération concrète dans différents domaines. Il faut encourager de nouveaux progrès dans des domaines traditionnels tels que l’aéronautique, le spatial, l’énergie nucléaire civile et l’agroalimentaire, développer le commerce et les investissements dans les deux sens, et préserver la stabilité et la fluidité des chaînes industrielles et d’approvisionnement mondiales. Il faut exploiter le potentiel de coopération dans les énergies vertes et l’innovation technologique, renforcer les communication et coordination dans la lutte contre le changement climatique et la conservation de la biodiversité, et garantir conjointement un véritable multilatéralisme.

Il convient enfin de créer une bonne atmosphère pour le développement des relations Chine-France et Chine-UE, afin que les graines de l’amitié prennent racine dans le cœur des deux peuples, en particulier chez les jeunes.

Numéro 14 octobre-décembre 2022
APN&CCPPC 2023
De la passion aux responsabilités
Le « village sur les nuages »
Les solutions fondées sur la nature et ses pratiques mondiales
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