La Chine et l’UE doivent profiter du 50e anniversaire de leurs relations diplomatiques pour renforcer la communication stratégique et la confiance mutuelle.
Lu Shaye, membre du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC) et représentant spécial du gouvernement chinois pour les affaires européennes, participe aux discussions en groupe sur l’amitié avec l’étranger lors des « Deux Sessions », le 8 mars 2025.
En 2025, la Chine et l’UE célébreront le 50e anniversaire de l’établissement de leurs relations diplomatiques. À ce moment crucial, avec le retour de Trump à la Maison-Blanche, le conflit russo-ukrainien non résolu et de multiples incertitudes, le contexte international évolue rapidement, attirant une attention accrue sur l’avenir des relations sino-européennes. Plus tôt cette année, le président Xi Jinping a souligné lors d’un appel téléphonique avec le président du Conseil européen António Costa que plus la situation internationale était sérieuse et complexe, plus la Chine et l’UE devaient rester fidèles à l’intention initiale présidant à l’établissement de leurs relations diplomatiques, renforcer la communication stratégique, améliorer la confiance mutuelle stratégique, et s’en tenir à leur positionnement de partenariat.
Lu Shaye, membre du Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC), le plus haut organe consultatif politique du pays, et représentant spécial du gouvernement chinois pour les affaires européennes, a affirmé dans une interview exclusive pour Dialogue Chine-France lors des « Deux Sessions » (les sessions annuelles de l’Assemblée populaire nationale et de la CCPPC) que la politique de la Chine envers l’UE, qui repose sur les bénéfices mutuels et les résultats gagnant-gagnant, restait inchangée. Il a souligné que la Chine et l’UE devaient profiter de l’opportunité offerte par la commémoration du 50e anniversaire de l’établissement de leurs relations diplomatiques pour renforcer la communication stratégique et la confiance mutuelle, dissiper les zones d’ombre, et avancer ensemble dans la bonne direction pour se frayer une voie vers l’avenir.
Une opportunité majeure d’amélioration
Après l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, les États-Unis ont recommencé à se retirer de certains accords et organisations internationales et nourri des courants opposés à la mondialisation. Lu Shaye a souligné que le « choc Trump » devrait servir à un sursaut européen. « L’administration Trump ne fait en effet pas que faire pression sur la Chine, car elle ne montre aucune pitié envers ses alliés européens non plus. Au cours des quatre dernières années, l’administration Biden avait fait de son mieux pour amadouer l’Europe, mais maintenant, l’administration Trump a commencé à faire monter la pression », a expliqué Lu Shaye. Il estime que cédant au chant des sirènes de l’administration Biden, l’Europe entretenait des illusions irréalistes, ce qui a provoqué un décalage dans son positionnement vis-à-vis de la Chine. Dans le soi-disant « triple positionnement », l’Europe était en fait encline à considérer la Chine comme un « rival systémique », une interprétation erronée.
Wang Yi, membre du Bureau politique du Comité central du Parti communiste chinois et ministre des Affaires étrangères, s’est exprimé sur les relations Chine-UE lors de la conférence de presse en marge des « Deux Sessions » le 7 mars. « Comme l’ont montré les échanges Chine-UE au cours des 50 années écoulées, l’expérience la plus précieuse est le respect mutuel, la force motrice la plus puissante est le bénéfice partagé, le consensus le plus solide est l’attachement au multilatéralisme, et la définition la plus pertinente est le partenariat », a-t-il remarqué. Pour Lu Shaye, la politique de la Chine envers l’Europe n’a en fait jamais changé, le pays ayant toujours prôné l’amitié mutuelle et la coopération gagnant-gagnant. Dans un contexte de grands bouleversements dans la situation internationale, la coopération Chine-UE a progressé ces dernières année, avec des hauts et des bas. Les deux parties doivent profiter de l’occasion offerte par le 50e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques pour perpétuer les bonnes traditions et envisager ensemble l’avenir.
Lu Shaye a déclaré que le « choc Trump » était également une opportunité donnée à l’Europe pour s’interroger sur sa politique passée à l’égard des États-Unis et de la Chine. Il a souligné que la Chine et l’UE devaient faire rayonner la tradition de coopération et faire en sorte que les cinquante prochaines années soient dignes des attentes de tous. « Comment faire en sorte que les cinquante prochaines années soient encore meilleures ? Seules les relations de partenariat sont le fondement de la coopération amicale entre la Chine et l’Europe », a noté Lu Shaye.
Les domaines traditionnels et émergents vont de pair
Ces dernières années, les relations économiques et commerciales entre la Chine et l’UE ont été confrontées à de nombreux défis, et l’Accord global sur les investissement Chine-UE reste au point mort. Lu Shaye a souligné que la coopération économique et commerciale entre la Chine et l’UE a un immense potentiel et que la clé réside dans le changement de mentalité et la transformation des forces motrices anciennes et émergentes. « D’une part, nous devons actualiser les anciennes forces motrices et continuer à exploiter le potentiel dans les domaines de coopération traditionnels, notamment l’industrie manufacturière, l’agriculture, l’énergie nucléaire, l’aviation et l’aérospatiale. D’autre part, nous devons développer de nouvelles forces motrices et faire advenir des opportunités de coopération dans de nouveaux domaines, tels que l’intelligence artificielle, les mégadonnées et l’économie de basse altitude. La Chine possède des atouts dans le développement de ces industries émergentes. »
Au cours de ces vingt dernières années, l’UE a connu un développement économique et technologique lent et l’écart avec la Chine et les États-Unis s’est creusé. Les graves défis auxquels elle est confrontée ont suscité une inquiétude durable au sein de l’UE, ainsi que de nombreuses discussions sur la manière d’améliorer sa compétitivité. En 2024, le Rapport sur l’avenir de la compétitivité de l’UE présenté par l’ancien président de la Banque centrale européenne Mario Draghi reflète l’inquiétude de l’UE face au ralentissement de la croissance économique et propose 170 mesures de réforme. « Le rapport est le reflet des problèmes que l’UE a rencontrés dans son développement économique, notamment le retard dans les domaines émergents, en particulier les domaines émergents de haute technologie », a constaté Lu Shaye, disant que cela nécessitait que l’UE agisse de sa propre initiative et recherche activement un espace de coopération gagnant-gagnant.
Lu Shaye a souligné que la Chine avait toujours été ouverte à la coopération avec l’Europe. Quelle que soit l’évolution de l’environnement international, l’ouverture de haut niveau a toujours été une mesure importante pour le développement économique de la Chine. La Chine s’est par exemple engagée à promouvoir la mise en œuvre de l’Accord global sur les investissements Chine-UE. L’accord est conforme aux normes internationales les plus strictes en matière d’économie et de commerce, et met l’accent sur l’ouverture institutionnelle. Il s’agit d’un accord global, équilibré, de haut niveau, mutuellement bénéfique et gagnant-gagnant, et ses résultats couvrent les engagements en matière d’accès au marché, les règles de concurrence équitable, le développement durable, le règlement des différends ainsi que d’autres aspects. Une fois appliqué, cet accord jouera un rôle important dans la promotion de la coopération économique et commerciale bilatérale Chine-UE et stimulera la croissance économique mondiale.
Il est normal que la Chine et l’UE, deux grandes économies mondiales, aient des divergences sur certains points et aspects. Ce qui est important, c’est que les deux parties puissent proposer des solutions constructives et adopter une attitude optimiste en regardant vers l’avenir avec confiance, pour que la coopération produise à coup sûr les résultats escomptés.
La compréhension et la confiance sont le fondement de la coopération
Avec l’élargissement continu de la liste des pays bénéficiant d’une exemption de visa pour la Chine, le tourisme en Chine est devenu une nouvelle tendance internationale. En 2025, les ressortissants de 38 pays sont éligibles à cette faveur unilatérale. Dès la fin de l’année 2023, la Chine a mis en place une politique pilote d’exemption de visa pour les détenteurs de passeports ordinaires de six pays, dont la France, l’Allemagne et l’Italie. Pour Lu Shaye, cela démontre l’ouverture, la grandeur d’esprit, la volonté d’inclusion et la confiance de la Chine. « Nous allons faire tout notre possible pour faciliter la venue des étrangers et leur permettre d’y voir plus clair sur la Chine. Cela permettra de briser la bulle de filtres sur la Chine que les médias occidentaux ont créée dans le passé, et aidera les Occidentaux ordinaires à acquérir une compréhension correcte de la Chine », a expliqué Lu Shaye, remarquant qu’il s’agit d’une base importante pour le développement de relations amicales entre les deux parties. « S’il y a un biais cognitif, les politiques seront inévitablement mal alignées. Nous espérons que davantage d’étrangers viendront faire l’expérience de la Chine, verront la vraie vie des Chinois ainsi que le bonheur sur leurs visages. »
Lu Shaye a déclaré qu’en tant que représentant spécial du gouvernement chinois pour les affaires européennes, son travail consistait à aider à la coordination et à la gestion des affaires européennes, et à mener des consultations et des échanges avec les pays européens et les institutions de l’UE en fonction des besoins. « Je continuerai à déployer tous les efforts nécessaires pour promouvoir le développement des relations Chine-UE dans une direction positive », a assuré Lu Shaye, qui, grâce à ses nombreuses années de service en Europe, connaît bien la situation du terrain et entretient des sentiments profonds à son égard. « Je dois présenter le développement économique et social de la Chine, son système politique, sa politique étrangère et d’autres aspects à davantage d’amis européens, et les aider à comprendre la situation réelle en Chine. J’ai l’espoir que les deux parties, qui continuent à se comprendre et à s’apprécier, auront confiance dans la coopération mutuellement bénéfique pour devenir des partenaires qui se font mutuellement confiance. »