«Progresser vers une accessibilité accrue » constitue le sous-titre des Perspectives mondiales sur les véhicules électriques 2024, un document publié par l’Agence internationale de l’Énergie. Pour concrétiser cette vision, il est impératif que les véhicules électriques (VE) soient abordables et accessibles. En 2023, près de 14 millions de VE ont été vendus dans le monde (+35 % par rapport à 2022), soit près d’un cinquième des ventes totales de véhicules. La Chine en représentait près de 60 %, l’Europe un peu moins de 25 %, et les États-Unis 10 %. Pour les véhicules neufs, la Chine comptait pour un tiers des ventes de VE en 2023, contre un cinquième en Europe et un dixième aux États-Unis. Le potentiel de l’Europe, un marché traditionnellement fort, pour les VE reste important. 

Les VEN calent au démarrage en Europe 

L’émergence des véhicules à énergies nouvelles (VEN) est encore plus précoce que celle des véhicules à moteur à combustion interne (MCI). Toutefois, en raison des contraintes liées au développement du réseau mondial de l’industrie pétrolière et pétrochimique et à la technologie des batteries, le développement de VEN a longtemps stagné au moment même où il commençait à démarrer. 

Un véhicule électrique classe CLA de Mercedes-Benz au Salon international de l’automobile de Beijing 2024, le 29 avril 2024 

L’Union européenne (UE), à l’avant-garde de la lutte mondiale contre le changement climatique, a fixé des objectifs détaillés et ambitieux en matière de transition écologique, consistant à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici à 2030. Pour y parvenir, l’UE doit mobiliser tous les pans de l’économie et de la société, surtout le secteur automobile. Les pays européens, grands producteurs de véhicules à MCI, ont cependant longtemps été guidés par l’offre et sont donc peu enclins à développer des automobiles 100 % électriques et hybrides. 

Dans un contexte où ils ont le pouvoir d’orienter le marché, les grands constructeurs automobiles européens ont pour principal objectif d’améliorer les performances des véhicules à MCI, de rendre les véhicules plus attrayants et de réduire les coûts de fabrication. Ils ne sont pas disposés à investir dans la recherche et le développement des VEN pour concurrencer leurs propres produits. Pour résoudre cette contradiction entre l’offre et la demande, il faut opérer des changements du côté de l’offre et laisser le marché jouer son rôle dans l’allocation des ressources. 

Fournir des capacités de qualité avec de réelles compétences 

Le secteur des VEN chinois a connu un développement relativement rapide. Bénéficiant d’un système de fabrication complet, d’une connaissance approfondie de la demande du marché et des avantages d’un marché intérieur important, de nombreux nouveaux constructeurs automobiles ont émergé et ont acquis une certaine réputation sur le marché international. Par rapport aux véhicules à MCI, les VEN présentent les avantages d’un processus de production relativement simplifié, d’une interaction fréquente entre fabricants et consommateurs, et d’un cycle court de mise à niveau et d’itération des produits. Le développement rapide du marché local des VEN en Chine est indissociable de la transformation des infrastructures connexes et de l’amélioration continue des lois, des règlements et de l’environnement politique prévus à cet effet. Grâce au développement du réseau de recharge, le coût d’utilisation des VEN a considérablement baissé et l’expérience client s’est nettement améliorée. 

En plus de la prise en compte de l’utilisation de l’énergie différente, le développement de l’industrie des énergies nouvelles nécessite également des garanties matérielles et immatérielles. Son développement stable et durable s’appuie à la fois sur une innovation technologique et une forte capacité d’accompagnement au niveau de la production et des services. L’industrie automobile chinoise dispose d’un système complet et d’une base de fabrication pour le développement des VEN. L’écosystème global axé sur les VEN, y compris les batteries, le stockage d’énergie et la technologie des véhicules connectés, crée un bon environnement de développement pour toutes les parties afin de participer aux synergies en amont et en aval de la chaîne industrielle et répond aux besoins différenciés des consommateurs. C’est ce qui attire des marques automobiles étrangères pour développer et produire des VEN en Chine. Depuis quelque temps, certains politiciens et médias en Europe et aux États-Unis ne cessent de mettre en avant la théorie de la « surcapacité de la Chine », prétendant que les subventions du gouvernement chinois ont entraîné une surcapacité dans les énergies nouvelles et les VE, et que la Chine, afin d’écouler cette surcapacité, pratique le dumping à l’étranger à des prix soi-disant bas, entraînant des distorsions du marché et nuisant à l’économie d’autres pays. L’UE a d’ailleurs annoncé l’ouverture d’une enquête antisubventions sur les VE chinois. Le Premier ministre chinois Li Qiang a répondu à la théorie de la « surcapacité de la Chine » lors de ses entretiens avec le chancelier allemand Olaf Scholz, soulignant que les avantages de la Chine dans les énergies nouvelles avaient été acquis grâce à des compétences réelles et étaient le résultat de la pleine concurrence du marché, et ne provenaient pas des subventions gouvernementales. Le secteur chinois des énergies nouvelles continue de fournir une capacité de production de qualité et apportera une contribution importante à la croissance verte mondiale. 

Par rapport aux véhicules à MCI, les VEN ne sont encore qu’au début de leur développement, nécessitant des investissements continus des facteurs d’innovation. Toutefois, les innovateurs s’exposent souvent à des risques plus élevés dans leurs activités commerciales, et il est raisonnable d’attendre de plus gros profits en guise de compensation. Les entreprises chinoises de VEN ont le courage de surmonter les contraintes du concept traditionnel du développement automobile, d’améliorer les performances et le confort des véhicules du point de vue de l’expérience client, en augmentant leur autonomie et leur capacité à faire face à divers types de conditions routières et météorologiques complexes. Ces innovations sont reconnues par les consommateurs et elles ont gagné le respect des visiteurs du Salon automobile européen. Dans le même temps, les réactions d’un marché d’envergure accélèrent davantage le processus d’innovation des VEN. Sur un marché international plus large, les VEN chinois répondent sans cesse à la demande des consommateurs et recherchent des améliorations correspondantes. La voix accrue des consommateurs démontre aussi le pouvoir de la demande à modifier le rapport offre-demande. 

Développer une coopération plus large 

En raison des revenus et de l’expérience client plus faible que prévu des VEN en Europe, il existe une sous-consommation sur le marché des VE. Parallèlement, il y a toujours des écarts de développement entre les pays européens, et l’ajustement des performances des VE en fonction des segments du marché pose de nombreux défis aux constructeurs automobiles. En vue de réduire le risque d’interruptions de la chaîne d’approvisionnement qui préoccupe des pays européens, de nombreuses entreprises ont modifié l’objectif optimal de gestion des stocks, passant de zéro stock à un stock approprié et un équilibre durable. Pour le secteur des VEN, parvenir à un approvisionnement stable demande en effet beaucoup d’efforts. 

Afin de répondre à la demande du marché, la diversification des sources d’approvisionnement reste un modèle viable, et un certain nombre d’entreprises chinoises de VEN sont capables de garantir l’approvisionnement. Par rapport à d’autres régions, l’UE établit des normes plus élevées dans la protection de l’environnement, la teneur en matière chimique des produits et la confidentialité. En conformité avec les normes strictes de l’UE en matière de protection de l’environnement et de performance des produits, de nombreux constructeurs automobiles chinois font leur entrée sur le marché européen, démontrant leur puissance et créant un lien d’intérêt important pour les importateurs et les exportateurs. 

Afin de réaliser plus efficacement le développement de l’industrie des VEN, les pays européens doivent créer un environnement de développement plus favorable pour les fournisseurs de services et de produits des VEN, y compris les fournisseurs chinois. Dans une économie de marché, les entreprises doivent tenir compte à la fois des avantages et des risques dans leurs activités commerciales. Sur un marché pleinement concurrentiel, elles doivent planifier l’achat de matières premières et la production en anticipant la demande sur la base du rapport offre-demande. Même si les VEN peuvent réagir plus rapidement aux exigences du marché et de la production grâce aux progrès technologiques et à l’expérience accumulée, la maîtrise de la demande affecte également dans une large mesure la rentabilité opérationnelle des entreprises. 

Les pays européens insistent depuis longtemps sur l’ouverture et le respect des règles internationales. S’il est possible d’améliorer l’efficacité de l’adéquation entre l’offre et la demande sur le marché et de réduire les retards ou les erreurs dans la transmission des informations à travers une coopération synergique entre les parties concernées de la chaîne industrielle des VEN, cela contribuera à réduire le risque d’erreur de prévision du marché. 

En prenant en compte le développement réel de chaque pays et région, l’UE pourrait alors développer rationnellement une chaîne industrielle liée aux VEN, encourager et protéger la dynamique d’innovation et de développement, promouvoir l’allocation raisonnable et efficace des éléments de ressources pertinents entre la Chine et l’Europe, réduire l’influence des actions gouvernementales sur les investissements et les activités commerciales des entreprises, et créer davantage d’opportunités de coopération pour les petites et moyennes entreprises. Ainsi, la Chine et l’UE disposeront d’un large éventail d’intérêts communs et de nombreuses possibilités de développement synergique dans les VEN.  

*ZHOU MI est chercheur à l’Académie chinoise du commerce international et de la coopération économique relevant du ministère du Commerce