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Un livre blanc pour aider à un juste contrôle des exportations Chine-Europe
By ZHAO YONGSHENG | Dialogue Chine-France | Updated: 2022-01-24 09:59:00

Des locomotives mixtes diesel-électrique (CDA5B1) sont exportées via le port de Xigang, à Changzhou (Jiangsu), le 20 décembre 2021. 

La Chine vient de publier un livre blanc intitulé Le contrôle des exportations de la Chine, le 29 décembre 2021. En réalité, ce document est le prolongement naturel des efforts déployés précédemment : en premier lieu, la Loi sur le contrôle des exportations de la République populaire de Chine a été adoptée le 17 octobre 2020 lors de la 22e réunion du Comité permanent de la XIIIe Assemblée populaire nationale et est entrée en vigueur le 1er décembre de la même année. Ensuite, le ministère chinois du Commerce a amendé et publié en avril 2021 les Opinions directrices sur l’établissement d’un programme de conformité interne pour le contrôle des exportations par les exportateurs de biens à double usage et les Lignes directrices sur la conformité interne pour le contrôle des exportations de biens à double usage.

Ce livre blanc, cette loi, ces opinions et ces lignes directrices ne sont certes que quelques-uns parmi tant d’autres livres blancs, lois, opinions et lignes directrices élaborés au fil du temps, mais ils constituent un évènement important, car c’est la première fois dans son histoire que la Chine agit de la sorte dans le cadre du contrôle des exportations.

Le contrôle des exportations de la Chine se compose de quatre parties, à savoir la position fondamentale de la Chine sur le contrôle des exportations, l’amélioration constante du système juridique et réglementaire pour ce contrôle, la modernisation du système de ce contrôle, enfin, les échanges et la collaboration internationaux. L’objectif de cet ouvrage est de donner une vue d’ensemble sur la position, les institutions et les pratiques de la Chine concernant l’amélioration de la gouvernance du contrôle des exportations, et de décrire les engagements et les actions de la Chine pour sauvegarder la paix et le développement du monde, ainsi que la sécurité aux niveaux national et international.

Ce livre blanc pourra aider l’Europe et la Chine à assurer ensemble un contrôle des exportations de manière équitable, raisonnable et non discriminatoire, si les deux parties – surtout la partie européenne – sont conscientes de la nécessité et de la faisabilité de cette collaboration sino-européenne.

En réalité, comme le souligne le livre blanc, le contrôle international des exportations doit surmonter plusieurs défis aujourd’hui. Dans cet article, nous en citerons deux.

Le premier est l’abus des mesures de contrôle des exportations et les restrictions déraisonnablement discriminatoires. Certains pays ont même généralisé le concept de sécurité nationale, fabriqué des excuses et orienté le pouvoir de l’État pour qu’il s’ingère dans le flux commercial normal et les transactions normales du marché, utilisant fréquemment le contrôle des exportations comme outil pour attaquer et intimider d’autres pays. Et les conséquences en sont graves : les actes de certains pays ont porté atteinte aux intérêts légitimes des pays en développement en termes d’utilisation pacifique des articles contrôlés, perturbé les chaînes industrielles et d’approvisionnement internationales, et nui au développement durable de nombreux pays. 

Le second défi réside dans les tentatives de certains pays d’agir contre le vrai multilatéralisme, ou même d’appliquer deux poids deux mesures dans les affaires liées à la non-prolifération des articles contrôlés. En réalité, de véritables pratiques unilatérales sont adoptées au nom du multilatéralisme.

Et dans l’abus de ces mesures de contrôle et ces tentatives anti-multilatéralisme, les pays européens dont la France se trouvent en fait dans la même situation que les pays émergents dont la Chine malgré l’écart de richesse nationale de ces deux groupes de pays : l’un du haut revenu, l’autre du bas et moyen revenus. Autrement dit, les Français sont face au même abus des mesures de contrôle et aux mêmes tentatives contre le multilatéralisme que les Chinois, bien que la France, une économie déjà avancée, soit quatre fois plus riche en PIB par habitant que la Chine, une économie encore en développement.

Rappelons que l’affaire du Français Frédéric Pierucci d’Alstom et l’affaire de la Chinoise Meng Wanzhou de Huawei ne sont pas des hasards. Tout cela avait été minutieusement préparé par certain pays. Sachant que ce ne sont que deux exemples illustrant l’abus et les tentatives de certains pays vis-à-vis de la France et de la Chine, nous pouvons imaginer combien les transactions et activités commerciales normales françaises et chinoises ont été perturbées, les relations économiques et commerciales seront ainsi déformées.

Herman Van Rompuy, ancien président du Conseil européen, prononce une allocution
par liaison vidéo lors du 9e Forum mondial de la Paix à Beijing, le 3 juillet 2021
 

Ainsi, la France et la Chine pourront-elles collaborer dans la lutte contre cet abus, ces tentatives ou même l’hégémonie économique et commerciale de certains pays dans le contrôle des exportations et plus largement dans le maintien de l’ordre économique et du commercial mondial ?

Ensuite, quelles solutions proposer pour une collaboration sino-européenne dans cette lutte ? En voici deux, l’une à court terme, l’autre à moyen et à long termes.

La solution à court terme est la reprise immédiate des négociations de l’Accord d’investissement Chine-UE, suspendues pour une raison plutôt politique. Ce traité bilatéral est le fruit d’efforts intenses des deux côtés pendant de nombreuses années.

La solution à moyen et à long termes est la création de zones de libre-échange (ZLE) entre l’Union européenne et la Chine. Cette dernière a déjà signé des traités de libre-échange (TLE) avec quelques économies européennes, dont l’Islande et la Suisse. Les ZLE sont aujourd’hui une forme de plus en plus importante pour améliorer les transactions commerciales et l’intégration économique entre les différentes économies du monde.

Si la reprise des négociations de l’Accord d’investissement Chine-UE a un objet plutôt financier (la mobilisation des flux de capitaux entre l’UE et la Chine), la création des ZLE a un objet plutôt commercial (la mobilisation des flux de marchandises entre l’UE et la Chine). Ces deux solutions seront donc toutes deux importantes et complémentaires sur la route d’un contrôle des exportations équitable, raisonnable et sans discrimination.

*ZHAO YONGSHENG est professeur de finances et directeur du Centre de recherche sur l’économie française, Academy of China Open Economy Studies at the University of International Business and Economics (UIBE).

 
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