En France, Théophile Gautier (1811-1872), un auteur très connu, a dit que le hasard n’existe pas, car « le hasard, c’est peut-être le pseudonyme de Dieu quand il ne veut pas signer ». Quoiqu’il en soit, ce fut une belle rencontre à Dublin en 2009 qui lia le sort de REMPART et de la Fondation Ruan Yisan. Depuis, cette coopération n’a cessé de se développer et seule une pandémie nous a obligés à mettre un frein à nos échanges sur place.
En 2014, des jeunes volontaires chinois et français restaurent les maisons
de Tunpu, un village aux spécificités uniques dans le Guizhou.
Ensemble, nous avons développé cette idée que les chantiers de bénévoles – des vacances en travaillant – sur des sites patrimoniaux étaient un outil magique pour à la fois restaurer le patrimoine et envisager l’avenir. De Pingyao à Yunshantun, de Suzhou à Xijiang en passant par Jiulong, nous avons démontré au cours des années, pendant plus de vingt sessions sur une douzaine de sites variés et dans cinq provinces différentes, que les vertus de ce partenariat sont immenses.
L’universalité de la culture
REMPART est une organisation française qui a pour ambition d’associer des citoyens autour d’un projet concret et collectif sur le patrimoine. Depuis 55 ans, son but est de montrer que le patrimoine n’est pas seulement une question réservée aux experts, aux propriétaires ou même aux collectivités locales, mais qu’il est aussi un secteur dont la société civile engagée peut et doit se saisir. Le patrimoine est au cœur du projet de REMPART, il en est à la fois le but et le support. Le but, car il s’agit de restaurer, de réhabiliter et de transmettre aux générations futures un patrimoine hérité du passé ; le support, car le patrimoine constitue un objet de formation, de découverte, d’apprentissage, d’inclusion pour les personnes, jeunes et moins jeunes, qui participent au projet.
En 2016, des volontaires chinois et français restaurent la résidence du clan Feng, à Xingyi, dans le Guizhou.
Les chantiers de bénévoles donnent à tous l’occasion d’être acteurs de la transmission du patrimoine. Ils sont aussi l’occasion de rencontres interculturelles et internationales et d’exercice de la citoyenneté.
REMPART partage, avec ses partenaires chinois, les mêmes valeurs concernant le patrimoine et sait combien il est important pour l’être humain de le restaurer et de le promouvoir. Le patrimoine permet de toucher tout un chacun ; le patrimoine, c’est la culture, et nous avons besoin de la culture et de l’accès à la culture. En cela, nous faisons partie d’une universalité étonnante. Nous désirons fortement capturer, cueillir et partager ce qui est beau, car nous avons besoin de la beauté dans nos vies. Nous avons besoin de réconforter nos esprits, nos âmes avec la beauté, et ce, pas seulement pour nous-mêmes, mais bien parce que c’est une force de cohésion puissante et efficace. Nous touchons toutes sortes de gens, toutes sortes de milieux, la diversité est présente partout dans nos actions. Nos valeurs sont si importantes, essentielles, éternelles ! Nos sites sont majestueux, beaux, nos projets sont porteurs de sens, nous participons au bien-être général.
Une grande famille
Dans un chantier de bénévoles, nous sommes comme une famille avec nos différences, nos liens, notre diversité et nous avons beaucoup à partager. C’est ce que nous avons vécu partout en Chine avec des jeunes Chinois extrêmement motivés pour apprendre, des ouvriers tellement patients et pédagogues, et des bénévoles français amoueux de la Chine. Nous avons été reçus merveilleusement et avons profité de la culture chinoise, de sa gastronomie, de sa musique et de ses danses. Les participants n’oublieront jamais ces quelques semaines passées ensemble. Un chantier international de bénévoles est un outil essentiel pour l’amitié entre les peuples, pour leur connaissance mutuelle et pour leur développement personnel, puisqu’il est question de respect, de tolérance, de soutien, d’égalité et d’échange.
Nettoyage des briques de pavement du temple de Liancun (Shanxi) en 2014
Yue Jian, initiateur du camp-chantier de conservation du patrimoine chinois au Guizhou, pourra en témoigner. Il a à la fois participé à une formation à l’organisation de chantier et à un chantier en France, et il a aussi mis en œuvre avec une grande réussite dans la province du Guizhou des activités qui sont l’exemple même de ce que nous prônons en France : le respect des matériaux, la réutilisation du site et l’implication d’une collectivité locale en faveur d’une architecture rurale menacée. Il faut le féliciter pour son implication et son travail acharné pour la sauvegarde du patrimoine.
En 2016, 20 volontaires et artisans de Chine et de France participent à la restauration de la résidence du clan Feng dans le Guizhou.
Le patrimoine demande du temps et nous nous devons de savoir prendre ce temps, mais il ne faut plus en perdre, car d’une part, tout ce qui n’est pas entretenu s’abîme très vite et d’autre part, nous devons grâce au patrimoine contribuer à une meilleure connaissance mutuelle. Nous construisons l’avenir sur les bases du présent en utilisant précisément le passé et ce lien invisible qui nous unit tous, nous renforce dans notre besoin de cohésion. Le patrimoine permet une connexion avec le futur. Nous avons dans nos mains cet outil magique que sont les chantiers de bénévoles.
Marie-Georges Pagel-Brousse • présidente de l’Union REMPART