Société

Une région à découvrir de ses propres yeux
By UWE BEHRENS* | Dialogue Chine-France | Updated: 2024-03-19 17:29:00

Un agriculteur et un technicien examinent le coton dans un champ dans la préfecture autonome mongole de Bayingolin.  

En automne de 2023, ma femme et moi avons décidé d’effectuer un nouveau voyage au Xinjiang. J’ai travaillé dans la logistique pendant près de 20 ans en Chine et je m’y suis rendu plusieurs fois car mon entreprise avait un bureau à Urumqi, le chef-lieu. Mes collègues et mes clients étaient de l’ethnie Han, de l’ethnie ouïgoure, de l’ethnie kazakhe, entre autres, et j’ai eu l’occasion de voyager un peu partout dans la région.

Une fois la décision prise, je suis allé demander mon visa à Berlin. Le personnel m’a dit que le visa pour la Chine suffisait pour voyager dans le Xinjiang. Arrivé à Beijing, j’ai cherché à obtenir une confirmation dans le service concerné et j’ai appris qu’un laissez-passer était en revanche nécessaire pour voyager dans les zones frontalières avec l’Afghanistan et le Pakistan.

Cette fois-ci, je voulais visiter le sud du Xinjiang, mais aussi la zone frontalière. Il me fallait donc un laissez-passer. Dans le Centre de service administratif de l’arrondissement de Tongzhou, à Beijing, j’ai effectué la demande sur une borne. Tout a été simple et je n’ai eu qu’à insérer mon passeport, mon visa et ma photo d’identité numérique pour qu’un laissez-passer sorte de la borne.

Le Grand Bazar d’Urumqi 

Un voyage de découverte 

Le premier jour de notre voyage, mon épouse et moi avons visité l’ancienne ville de Kachgar et son Grand Bazar. Ce lieu très animé faisait le plein de touristes avec des stands remplis de spécialités du Xinjiang.

À la tombée de la nuit, des restaurants et des bars prennent vie et tout le monde, quelle que soit l’ethnie, entonne avec entrain des chansons populaires. Dans cette atmosphère joyeuse, il est difficile de distinguer les touristes des locaux.

Je suis passionné par la culture bouddhiste chinoise et je visite des sites historiques chaque fois que je voyage en Chine. Le deuxième jour, nous avons visité la pagode de Moerfo, à 50 km de Kachgar. Nous y avons rencontré de jolies filles ouïgoures, danseuses d’une troupe, et nous avons bavardé. Elles m’ont raconté leur éducation bilingue (mandarin et ouïgour) et nous avons abordé des sujets d’actualité tels que la réforme éducative et la fulgurante industrialisation dans la région.

En traversant un champ en voiture, nous avons vu des balles de coton éparpillées un peu partout. La récolte du coton dans le Xinjiang commence à la fin août et dure jusqu’en novembre. C’est la plus grande région productrice de coton de Chine. En 2022, la région en a produit 5,39 millions de tonnes, représentant plus de 90 % de la production nationale. Actuellement, le Xinjiang dispose de 106 millions de mu de terre arable (1 mu = 1/15 ha), dont 40 millions sont destinés à la culture de coton.

En 2019, durant mon voyage dans le Xinjiang, j’avais rencontré des saisonniers venus des régions intérieures qui cueillaient du coton pendant la saison de la récolte. Ces dernières années, le taux de mécanisation de la culture et de la cueillette du coton au Xinjiang a considérablement augmenté. En 2016, 21 % du coton était récolté par des machines, tandis qu’en 2022, ce chiffre a atteint 81 %. Dans un village, nous avons également vu des exploitants effectuer la cueillette à la main, mais c’est parce que les champs étaient trop petits.

Pendant ce voyage, j’ai rarement eu l’occasion de payer en espèces. Les magasins, les parkings et les restaurants fournissent tous un service de paiement mobile. À ma grande surprise, j’ai même pu payer avec mon smartphone au Grand Bazar de Kachgar, car la région est entièrement couverte par le réseau 4G ou 5G.

Dans le district de Tashkurgan, à la frontière du Tadjikistan, de l’Afghanistan et du Pakistan et où vit principalement la minorité ethnique tadjike, nous sommes passés par un point de contrôle semblable à un péage routier. À l’entrée, un message nous demandait de baisser la vitre et de regarder la caméra. Ne comprenant pas le chinois, j’ai continué et notre voiture a été arrêtée. Ma femme m’a expliqué ce dont il retournait et après avoir rempli les formalités demandées, nous avons pu reprendre la route. Il s’agissait en fait de vérifier les informations de mon passeport et de mon visa grâce à la reconnaissance faciale. Tous les voyageurs, quelles que soient leur ethnie ou leur nationalité, doivent suivre ces consignes. C’est le seul contrôle effectué pendant notre séjour de quatre jours dans cette région frontalière. À la réception de l’hôtel, l’enregistrement s’est effectué avec une photo numérique sans avoir à remplir de formulaires.

Partout où je suis allé, j’ai constaté un usage répandu de la technologie numérique, qui simplifie considérablement les procédures administratives et améliore l’efficacité des services administratifs.

Uwe Behrens bavarde avec des résidents de l’ancienne ville de Kachgar, le 5 novembre 2023. (Photo fournie par Uwe Behrens) 

Nouvelles opportunités du développement 

L’année 2023 marque le 10e anniversaire du lancement de l’initiative « la Ceinture et la Route ». Le Xinjiang est un passage important de l’ancienne Route de la Soie. Grâce à la mise en œuvre de l’initiative, le Xinjiang présente de nouvelles opportunités avec la construction des réseaux ferroviaire, routier et aérien modernes.

Je suis heureux de pouvoir contribuer au développement de cette région. Lorsque le nouveau poste-frontière ferroviaire Alashankou/Druzhba entre la Chine et le Kazakhstan a été ouvert, je me suis occupé des procédures des premiers conteneurs à destination de l’Europe, en collaboration avec des fonctionnaires locaux. Durant ce voyage, j’ai été le témoin des changements apportés par cette initiative.

Il y a plus de deux mille ans, le district de Tashkurgan a été un relais important sur l’ancienne Route de la Soie. Les caravanes de chameaux de Chine et d’autres pays d’Asie et d’Europe passaient par là. Le moine chinois Xuan Zang, qui a vécu sous la dynastie Tang et qui a largement contribué à la diffusion du bouddhisme en Chine, a prêché dans ces lieux. Il s’agit donc d’un véritable site historique, comparable aux vestiges grecs ou romains.

Aujourd’hui, de plus en plus de personnes réalisent que l’ancienne Route de la Soie est un lien en miniature entre la Chine et le monde et souhaitent mieux la connaître. Le district de Tashkurgan est donc devenu un site touristique renommé dans la région frontalière. En 2023, le district a enregistré un nombre record de touristes. Pour promouvoir le développement du tourisme, le district a construit des musées, des hôtels et des restaurants, créant ainsi des emplois.

Pendant ce voyage, j’ai également visité le musée de la Route de la Soie à Urumqi. Dans une salle d’exposition, j’ai vu une enseignante donner des informations à ses élèves en mandarin et en ouïgour. Je me suis joint à eux. Les élèves se bousculaient pour bavarder avec moi en anglais. J’ai appris que les écoliers suivaient des cours en mandarin et dans la langue de leur ethnie (ouïgour ou tadjik). À la maison, ils parlent plutôt leur langue ethnique. Ces jeunes m’ont dit que chez eux, ils avaient des voisins originaires de Shanghai, de Kuqa ou de Tashkurgan. Les autorités locales encouragent le regroupement de différentes ethnies lors de l’attribution de logements.

Après ce voyage, je suis convaincu que les mesures que le gouvernement chinois a prises pour stimuler la croissance économique et assurer la stabilité sociale dans le Xinjiang ont obtenu de bons résultats. Je n’ai pas constaté l’oppression des Ouïgours ou des autres ethnies. Au contraire, j’ai vu des gens heureux, des usines modernes ainsi que des quartiers résidentiels, des hôpitaux et des écoles récemment construits. Je ne peux m’empêcher de conseiller à tous nos journalistes occidentaux d’effectuer un voyage au Xinjiang pour se faire une idée par eux-mêmes.

*UWE BEHRENS est un économiste allemand expert en questions chinoises.

 

Numéro 18 octobre-décembre 2023
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