La 29e Conférence des parties (COP29) à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques à Bakou (Azerbaïdjan) est parvenue à un résultat équilibré sous la forme du Pacte de solidarité climatique. Reste maintenant à le mettre en œuvre. Les États-Unis, la Chine et l’Union européenne (UE) sont les trois plus grandes économies mondiales et les plus grands émetteurs de CO2, avec plus de 50 % des émissions mondiales en 2023. Leurs mesures pour lutter contre le changement climatique auront par conséquent un impact important sur la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris.
Logo de la COP29 à Bakou (Azerbaïdjan), le 23 novembre 2024
Des réponses différentes au changement climatique
L’UE dans son ensemble a atteint un pic des émissions de CO2 en 1990 et s’est engagée à réduire ses émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % par rapport aux niveaux de 1990 d’ici 2030 et à atteindre zéro émission nette d’ici 2050. Dans sa politique en matière de changement climatique, l’UE se concentre sur la mise en œuvre des objectifs climatiques par le biais de législations et de politiques, en formulant le Green Deal européen, en améliorant constamment les directives politiques dans les domaines des énergies renouvelables, des marchés de l’électricité et du secteur des transports, et par la tarification du carbone et par la bourse carbone. Elle se sert des mécanismes de marché pour contrôler les émissions de CO2, assure le déploiement des énergies renouvelables et améliorer l’efficacité énergétique. L’UE accorde également une grande attention à la diversité et à la résilience de la chaîne d’approvisionnement en énergie propre. Elle a adopté le Règlement européen pour une industrie « zéro net » en juin 2024 pour renforcer la fabrication de technologies propres dans le but de répondre à 40 % des besoins des infrastructures de l’UE d’ici 2030 et réduire la dépendance à l’égard des importations.
Les émissions de CO2 des États-Unis ont culminé en 2007, mais leurs politiques en matière de changement climatique se caractérisent par le pragmatisme, l’unilatéralisme et les hésitations. Un décret présidentiel de Joe Biden a fixé l’objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 50 à 52 % en 2030 sur la base des niveaux de 2005 et d’atteindre zéro émission nette d’ici 2050. Une fois que Donald Trump sera président, il devrait prendre des mesures régressives sur l’action climatique fédérale, mais il sera difficile d’influencer pleinement l’action climatique au niveau des États. La Californie, par exemple, a pris un certain nombre de mesures avant-gardistes en matière d’action climatique, en faisant notamment en sorte que l’électricité soit 100 % propre et neutre en carbone d’ici 2045, et que 100 % des nouvelles ventes de véhicules soient des véhicules zéro émission d’ici 2035.
Parc zéro carbone de la rue Pingdi, district de Longgang, à Shenzhen (Guangdong), le 14 juillet 2023
La Chine, la plus grande économie en développement, est également le plus grand centre manufacturier du monde. Le gouvernement chinois s’est engagé à atteindre le pic carbone avant 2030 et la neutralité carbone avant 2060. Si l’objectif de neutralité carbone de l’UE est de 60 ans après son pic carbone, et si celui des États-Unis est de plus de 40 ans, la Chine doit l’atteindre dans les 30 ans, ce qui contraint le pays à face à des pressions et à des défis sérieux. Afin d’atteindre l’objectif de neutralité carbone et de pic des émissions, la Chine a mis en place un système politique « 1+N », le premier faisant référence aux avis du gouvernement central sur le pic et la neutralité carbone et le Plan d’action pour le pic carbone avant 2030, et le second, aux plans d’applications pour les secteurs clés et autres domaines clés dans l’énergie, l’industrie et la construction, ainsi que des plans de garantie tels que le soutien technologique, le soutien financier, la comptabilité statistique et les puits de carbone écologiques. La Chine a par ailleurs lancé un marché national d’échange de droits d’émission de carbone en 2021, et le secteur de l’électricité a d’abord été inclus, suivi en 2024 par les secteurs du ciment, de l’acier et de l’aluminium électrolytique. Ce marché couvre environ 60 % des émissions nationales.
La Chine en tête des investissements dans les énergies propres
La politique en matière de changement climatique dépend des investissements réels pour obtenir des résultats concrets. Selon l’Agence internationale de l’énergie, en 2023, les investissements de l’UE dans les énergies propres s’élevaient à 110 milliards de dollars, contre 280 milliards de dollars pour les États-Unis et 680 milliards de dollars pour la Chine (70 % de plus que l’UE et les États-Unis combinés), soit un tiers du total des investissements mondiaux dans les énergies propres cette année-là.
Les données de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables montrent que la Chine contribuait à plus de la moitié de la capacité mondiale d’énergies renouvelables nouvellement installée en 2023. Fin 2023, la capacité mondiale installée de production d’énergie renouvelable atteignait 3 865 GW, dont la Chine représentait 38 %, l’Union européenne, 22 %, et les États-Unis, 10 %. Dans l’éolien et le photovoltaïque, l’avance de la Chine est encore plus marquante. En 2023, la capacité installée chinoise dans l’éolien et le photovoltaïque représentait respectivement 43 % du total mondial. En 2023, la capacité totale installée de production d’électricité à partir d’énergies renouvelables en Chine était de 1 516 GW, soit environ 52 % de la capacité totale installée de production d’électricité du pays, et la proportion de la capacité installée dans le charbon passait pour la première fois sous la barre des 40 %. Dans le domaine des véhicules à énergies nouvelles (VEN), les ventes en Chine s’élevaient à environ 9,5 millions d’unités en 2023, avec un taux de pénétration du marché de 35 %, représentant 65 % des ventes mondiales. En comparaison, les ventes dans l’UE atteignaient un peu plus de 1,5 million d’unités en 2023, avec un taux de pénétration du marché d’environ 15 %, tandis qu’aux États-Unis, elles étaient de 1,47 million d’unités, avec un taux de pénétration de 9 %.
Du point de vue de la capacité de production liée aux énergies renouvelables, les avantages de la Chine sont encore plus évidents. En prenant l’exemple du photovoltaïque, la capacité de production de plaquettes de silicium de la Chine représentait environ 95 % de la capacité de production mondiale en 2023, celle de production de silicium polycristallin, 96 %, et celle de production de composants, 83 %. Ces avantages dans la production d’énergies renouvelables ont été critiqués par certains pays développés, attaquant la capacité de production « excédentaire » de la Chine. Derrière cela se cache une arrière-pensée de protectionnisme commercial. La COP28 à Dubaï en 2023 avait proposé pour objectif de tripler les énergies renouvelables, la capacité mondiale installée d’énergies renouvelables devant atteindre 11 000 GW d’ici 2030. Au regard de cet objectif, la Chine ne dispose pas d’une capacité de production d’énergies renouvelables excédentaire. De plus, l’échelle de production et les progrès technologiques de la Chine ont généré une baisse significative du coût des énergies renouvelables. Toujours en prenant le photovoltaïque comme exemple, le coût mondial du photovoltaïque à concentration a chuté de plus de 90 % entre 2010 et 2023, devenant ainsi l’une des principales sources d’énergie propre, fiable et abordable.
La Chine a par ailleurs procédé à un verdissement des terres à grande échelle et continué à procéder à la reforestation pour étendre la superficie forestière et améliorer la qualité des forêts. Au cours des 20 dernières années, la Chine a contribué à environ un quart des nouveaux espaces verts au monde. Ses actions de verdissement des terres à grande échelle ont accru la capacité de puits de carbone des écosystèmes (forêts et prairies), contribuant ainsi à lutter contre le réchauffement climatique.
Renforcer la coopération dans la gouvernance mondiale du climat
La COP29 a proposé que les pays développés fournissent au moins 300 milliards de dollars de financement annuel d’ici 2035 pour soutenir l’action climatique dans les pays en développement. Il y a aussi eu un consensus sur les mécanismes du marché mondial du carbone. Reste néanmoins à déployer de gros efforts dans la lutte contre le changement climatique, et en tant que forces importantes dans la gouvernance climatique mondiale, la Chine, l’UE et les États-Unis doivent renforcer la coopération.
La Chine peut partager son expérience en matière de transition énergétique et de développement des énergies renouvelables. L’UE possède une riche expérience des mécanismes du marché du carbone et peut promouvoir la construction et le fonctionnement du marché mondial du carbone. Malgré les politiques climatiques incohérentes du gouvernement américain, les États faisant preuve d’une attitude positive dans la lutte contre le changement climatique peuvent participer pleinement à la coopération climatique internationale et à l’innovation technologique.
Les entreprises du secteur en Chine, dans l’UE et aux États-Unis peuvent aider conjointement les pays en développement à améliorer leur capacité à faire face au changement climatique grâce à la coopération sur marchés tiers. Ainsi, en septembre 2024, deux entreprises chinoises et Namibia Power Corporation ont officiellement signé un contrat de projet de production d’énergie solaire photovoltaïque de 100 MW. Il s’agit actuellement du plus grand projet de production d’énergie solaire photovoltaïque en Namibie, financé à hauteur de 80 % par la banque allemande de développement KfW. Une fois achevé en 2026, le projet contribuera à atténuer la pression sur la consommation intérieure d’électricité de la Namibie et à réduire sa dépendance à l’égard des importations d’électricité. Une telle coopération sur marchés tiers aura un effet positif sur la transition verte et la lutte contre le changement climatique en Afrique et même dans le monde.
La réponse mondiale au défi du changement climatique exige que tous les pays, en particulier les grandes économies comme la Chine, l’UE et les États-Unis, jouent un rôle de premier plan dans la promotion conjointe de la gouvernance climatique mondiale, en soutenant la transformation énergétique des pays en développement et la création d’un développement durable pour les générations futures.
*ZHAI YONGPING est conseiller principal du département de développement stratégique de Tencent, ancien chef du groupe énergie de la BAD