Société

Hymne à la Chine
By LIU TING, membre de la rédaction | Dialogue Chine-France | Updated: 2025-03-05 10:39:00

Joyce Jonathan en concert à Beijing en novembre 2024 

Née en novembre 1989 à Levallois-Perret, Joyce Jonathan n’a pas tardé à se faire un nom sur la scène musicale française. À seulement 20 ans, elle a sorti son premier album, « Sur mes gardes », qui a connu un succès fulgurant dans l’Hexagone. Sa voix douce et ses mélodies touchantes qui séduisent un large public ont fait d’elle une figure incontournable de la chanson française.

Au fil des ans, sa voix s’est fait connaître hors des frontières, notamment en Chine, où elle jouit d’une certaine popularité en interprétant des chansons en chinois. En participant à l’émission Cheng Feng 2024, le télé-crochet le plus populaire du pays, l’auteure-compositrice-interprète française a réussi à conquérir le cœur du public, devenant une superstar en Chine. Dès son plus jeune âge, elle foulait le sol de la Chine, un pays qui l’a profondément inspirée tant sur le plan personnel que musical. Aujourd’hui, elle est devenue une véritable ambassadrice culturelle, promouvant les échanges culturels entre la France et la Chine par le langage universel qu’est la musique.

Un lien particulier avec la Chine 

L’histoire de Joyce avec la Chine commence bien avant sa naissance. Ses parents, nés en Europe, étaient passionnés par la Chine dès leur jeunesse et ont très tôt appris le chinois. Son père a été diplômé de l’Université Tsinghua et sa mère a très tôt voyagé en Chine, puis a créé son agence de tourisme « La maison de la Chine », promouvant les échanges culturels entre la France et la Chine dès les années 1990. « Toute petite, je voyais des amis chinois de mes parents à la maison, ce qui m’a donné un sentiment de familiarité avec cette langue et cette culture », se souvient la chanteuse.

À l’âge de 11 ans, elle est allée en Chine pour la première fois. Lors de cette visite, elle a été impressionnée par l’immensité du pays, la chaleur de ses habitants et leur accueil. Ce voyage a éveillé sa curiosité pour la culture chinoise et planté les graines d’une affinité qui allait grandir et s’épanouir au fil des ans.

Tout au long de son adolescence, elle est revenue en Chine régulièrement, notamment à Beijing où sa mère et ses sœurs vivaient dans un hutong traditionnel. Ces expériences lui ont permis de s’imprégner davantage de la culture chinoise et de tisser des liens forts avec ce pays. Elle se souvient avec nostalgie de ces moments passés à explorer la ville, à découvrir ses rues animées et à acheter à 14 ans sa première guitare, un symbole fort de son parcours musical en devenir.

Lorsqu’elle a sorti son premier album en France à l’âge de 20 ans, elle a immédiatement pensé à partager sa musique avec le public chinois. « Ma maison de disque de l’époque qui distribuait dans tous les pays m’a proposé de sortir l’album en Chine. J’ai adoré cette idée et j’ai accepté, en enregistrant mes morceaux en chinois pour sortir une édition exclusive pour la Chine », explique-t-elle. Le public chinois était au rendez-vous, marquant le début d’une merveilleuse relation avec ses fans en Chine.

Selon la chanteuse, interpréter ses chansons en chinois n’est pas seulement un défi linguistique ; cela lui permet aussi d’explorer de nouvelles sonorités et d’enrichir son expression artistique. « Les sonorités chinoises me font chanter d’une nouvelle façon. »

Joyce Jonathan (1re à g.) et ses partenaires à l’émission chinoise Cheng Feng (PHOTOS FOURNIES PAR JOYCE JONATHAN) 

Cheng Feng 2024 : Un défi relevé avec brio 

En 2024, Joyce a accepté de participer à l’émission de variétés chinoise Cheng Feng (ou Ride the Wind, que l’on peut traduire par « Surfer sur les vagues »), une décision qui a surpris certains de ses fans. En effet, elle n’avait jamais participé à ce type d’émission auparavant, mais elle a été séduite par cette opportunité. « Se dépasser à travers l’apprentissage de nouvelles chansons, avec d’autres femmes très inspirantes », confie-t-elle.

L’émission regroupait 36 femmes de plus de 30 ans. Seulement six d’entre elles, dont Joyce, étaient étrangères. Pendant quatre mois, elles ont vécu dans de jolies villas à Changsha (Hunan), en équipes de deux, trois ou quatre, suivi des cours de chant et de danse et répété pour se produire lors de shows en direct. Dès le début, la chanteuse française a conquis le cœur des téléspectateurs chinois en interprétant Champs Élysées de Joe Dassin dans un style plus folk. Mais son succès ne s’est pas limité aux chansons françaises. Elle a aussi chanté des chansons uniquement en chinois, tels qu’une partie du célèbre Yueju, un opéra traditionnel chinois dans lequel les rôles masculins sont joués par des femmes.

Outre la difficulté de chanter en chinois, elle a suivi plusieurs cours de mise en scène pour réaliser les spectacles et s’entraîner sur les chorégraphies. La séparation avec sa fille de quatre ans pendant les longues périodes d’enregistrement a été une autre épreuve difficile. Mais elle a trouvé du réconfort dans le soutien des autres participantes, qu’elle appelle affectueusement ses « sœurs ». Beaucoup d’entre elles parlaient anglais, ce qui a facilité les échanges, et au fil du temps, la chanteuse a vu son niveau de chinois s’améliorer. À la fin de l’émission, elle était capable de comprendre les discussions et de chanter des chansons complexes en chinois. « J’ai beaucoup appris et je ne regrette pas d’avoir accepté le défi », affirme-t-elle. Peu importe l’intensité de la compétition et de l’entraînement, la chanteuse souriait constamment et répétait « 小意思 xiǎoyìsi », une façon d’exprimer à la fois son aisance et son attention envers les fans.

Cette expérience a été pour elle une source d’enrichissement personnel et artistique. « Chanter l’opéra Yueju était une expérience extraordinaire. Je ne pensais pas être capable de chanter aussi haut », se souvient-elle. Elle a également apprécié de chanter La Rencontre des lumières (让光遇见光) avec Laure Shang (Shang Wenjie) pour célébrer les 60 ans d’amitié entre la France et la Chine et découvert les chansons de Faye Wong (Wang Fei), qu’elle a interprétées lors de la finale.

Sa persévérance lui a permis de se faire un véritable nom en Chine. Le 27 juin 2024, elle a remporté la finale de l’émission, qui a comptabilisé plus de 13,5 milliards de vues sur internet, accédant au rang de superstar en Chine.

Passerelle culturelle entre la Chine et la France 

Pour Joyce, la musique est un langage universel qui transcende les frontières et les cultures. Elle en a fait l’expérience lors de sa participation à Cheng Feng, où elle a été émue par des mélodies même si les paroles en chinois lui étaient étrangères. Cette capacité de la musique à toucher les cœurs sans avoir besoin de mots est ce qui en fait un outil puissant pour promouvoir les échanges culturels entre la Chine et la France. « Les similitudes entre la Chine et la France se trouvent dans l’amour des grandes mélodies et les émotions qu’elles procurent. Il y a aussi beaucoup d’authenticité dans le chant », souligne-t-elle. C’est cette authenticité qu’elle cherche à transmettre dans ses propres compositions, qu’elle interprète en français ou en chinois. Elle constate que ses chansons Ça ira, Je ne sais pas, Sans toi et Je cours sont particulièrement appréciées du public chinois. « Je ressens une énergie différente sur ces chansons pendant les concerts en Chine », dit-elle.

Sa carrière est indissociable de son amour pour la Chine. Elle a organisé plusieurs concerts dans le pays. Rien qu’en novembre 2024, elle a effectué une tournée dans six villes chinoises. Chaque concert était soigneusement préparé, mélangeant chansons en français et en chinois, ainsi que des reprises de Cheng Feng, créant ainsi un lien entre son expérience sur les plateaux de télévision et ses concerts. Pour que chaque spectacle soit unique, elle a proposé des « chansons à la demande », permettant aux spectateurs de choisir deux chansons parmi une liste de dix titres. Elle a également travaillé avec des musiciens traditionnels locaux pour interpréter des chansons spécifiques à chaque ville, ajoutant ainsi une touche culturelle et personnelle. Les concerts de Shanghai et Hangzhou, avec la participation de Laure Shang et Chen Lijun, participantes de Cheng Feng, ont été particulièrement mémorables. « C’était magique », dit-elle.

Après de nombreuses visites en Chine, Joyce est impressionnée par les changements du pays. « Ce qui m’a le plus marquée, c’est l’organisation et la modernité. Je ressens à quel point la Chine a évolué ces 15 dernières années, dans l’organisation du travail, le développement, la culture et l’ouverture », témoigne-t-elle. Elle compare les émissions qu’elle a pu faire en 2010 avec celles d’aujourd'hui, notamment les plateaux télé qui l’ont impressionnée, ainsi que la rigueur et la motivation des jeunes Chinois.

Joyce a de nombreux projets musicaux en tête. « J’ai le grand bonheur de revenir régulièrement en Chine pour des émissions de télévision ou pour des tournées de concerts comme en novembre 2024. Quand je ne viens pas pendant plusieurs semaines, la Chine me manque », confie-t-elle. Elle a récemment sorti une chanson en duo français-chinois avec Chen Lijun, intitulée Cœur ouvert (秋遇), qui mélange chanson française et opéra chinois. « Elle est disponible sur toutes les plateformes en Chine et sortira bientôt en France. Avec Laure Shang, nous prévoyons de sortir une nouvelle chanson en duo toutes les deux sur l’une de mes compositions », révèle-t-elle. Une nouvelle tournée de concerts en Chine est prévue à la fin de l’année 2025, et elle est impatiente de préparer un nouveau spectacle pour son public.

Joyce conclut avec une déclaration en chinois qui résume son engagement : « 我全心全意地爱中国, ce qui signifie “J’aime la Chine de tout mon cœur” ». Plus qu’une chanteuse, elle est une véritable ambassadrice culturelle, tissant des liens musicaux entre la France et la Chine, avec passion et authenticité.

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