Dans la soirée du 11 février, le président français Emmanuel Macron a souhaité une bonne année en chinois aux internautes sur les réseaux sociaux. « Meilleurs vœux à tous ceux qui célèbrent le Nouvel An chinois. Je vous souhaite à tous santé, succès et bonheur ! »
Avec les flux démographiques internationaux, la fête du Printemps, une fête traditionnelle chinoise, s’est progressivement déplacée hors de Chine pour atteindre de plus en plus de pays.
Le réveillon du Nouvel An chinois est célébré devant un logement de caverne dans l’ouest de la Chine rurale.
Pour les jeunes qui travaillent dans les grandes villes loin de chez eux, que signifie vraiment le Nouvel An chinois ? Est-ce le long chemin du retour dans sa région natale ? Est-ce le moment de retrouver enfin ses parents ? Est-ce l’occasion de vacances sans la pression du travail ? Ou est-ce simplement le fait de manger chaque jour des repas mijotés par sa mère ? Cette année, en raison de cas sporadiques de COVID-19 avant la fête du Printemps, il a été préconisé de rester sur place, ce qui a changé les conditions normales du Nouvel An. D’habitude, je rentrais avec mon fils et mon mari dans ma ville natale pour passer le Nouvel An chinois avec mes parents. J’étais également prête à subir l’interrogatoire de mes parents et de toute la famille, me demandant pourquoi je n’avais toujours pas un second enfant. J’ai finalement répondu à l’appel de mon entreprise et accepté le généreux colis festif pour que tout le monde reste à Beijing et passe un Nouvel An l’esprit tranquille.
Pour la première fois, je me suis alors demandé ce que la fête du Printemps signifiait pour moi.
Quand nous étions enfants, dans ma famille, la fête du Printemps signifiait des vêtements neufs et des plats délicieux. À la fin des années 1980 et au début des années 1990, malgré plus de dix ans de réformes et d’ouverture, nous vivions encore chichement, dans un petit district du nord du pays. Le maigre salaire de mon père devait nourrir une famille de trois enfants. Ma mère était femme au foyer et tenait un budget serré pour qu’il en reste un peu pour la fête du Printemps. Elle pouvait alors acheter une nouvelle tenue aux enfants, ce qu’elle ne pouvait pas se permettre en temps ordinaire, ainsi que du poisson et de la viande pour le réveillon, qu’on ne voyait jamais sur la table habituellement. Les enfants attendaient quant à eux le crépitement ininterrompu des pétards avec la plus grande impatience.
Lors du Nouvel An, les enfants adoraient rendre visite aux parents et amis en famille. Rien de plus simple que de les saluer, du moment qu’il y avait des « enveloppes rouges » et des bonbons pour nous rendre heureux. Les enfants ne se préoccupaient guère de ce que les adultes avaient à se raconter. Je garde donc de merveilleux souvenirs de la fête du Printemps de mon enfance. Malgré les formalités superflues et compliquées, notamment les préparatifs du Nouvel An, les sacrifices aux ancêtres, les visites aux parents et amis, seuls les adultes s’en occupaient alors que la seule préoccupation des enfants, c’était de s’amuser, et d’oublier les résultats des examens scolaires qui venaient juste de se terminer.
L’auteure n’a pas lésiné pour fêter comme il se doit le Nouvel An chinois.
En grandissant, rien n’a fondamentalement changé, avec toujours les mêmes retrouvailles, les mêmes repas et les mêmes « enveloppes rouges », mais l’atmosphère s’est petit à petit transformée. Lorsque j’ai été admise à l’université dans une grande ville, la question que l’on me posait le plus souvent pendant la fête du Printemps était de savoir si je voulais passer un examen d’entrée de troisième cycle et où je comptais travailler plus tard, si j’avais un petit ami ou si je voulais que l’on me présente quelqu’un. Ainsi, après avoir passé la même fête du Printemps que la plupart des jeunes pendant quelques années, je me suis finalement mariée et j’ai eu un enfant. Maintenant, ce que l’on me demande avec insistance dans ma ville natale, c’est quand j’aurais un second enfant. Par ailleurs, d’une enfant recevant des enveloppes rouges chaque année, je suis devenue une adulte qui doit en distribuer aux enfants de la famille. Lorsque je rends visite aux parents et amis pour discuter avec eux, je deviens aussi une interlocutrice dans la conversation, parlant de la vie professionnelle et familiale. Mon fils, tout comme moi enfant, profite des plaisirs des bonbons en abondance et de la manne des « enveloppes rouges ».
Cette année, c’est principalement moi qui ai effectué pour la première fois les préparatifs pour le réveillon et le Nouvel An. Me souvenant de mon enfance, j’ai acheté les fruits secs et les plats frais pour cette occasion. J’ai également téléchargé un certain nombre d’applications pour trouver des recettes, ainsi que des vidéos. Le tutoriel sur les gâteaux de riz a ajouté une touche traditionnelle délicate sur la table pour une nouvelle année prospère. Bien que les zones urbaines de Beijing et d’autres villes aient interdit les feux d’artifice et les pétards depuis de nombreuses années, j’ai voulu me servir de méthodes traditionnelles pour permettre aux enfants de ressentir autant que possible l’atmosphère particulière du Nouvel An. C’est aussi la première fois que j’ai voulu transmettre quelque chose, car peu importe les modalités, la fête du Printemps, c’est l’espoir d’une vie meilleure pour la famille.
Bien que loin des nôtres, la table du réveillon du Nouvel An contenait beaucoup de spécialités locales. Mes parents m’avaient déjà fait livrer les meilleurs produits du Nouvel An comme le coq d’abattage, les boulettes de viande de ma mère et même les oignons d’hiver faits maison.
« Les oignons d’hiver sont chers cette année ! Maman les cultive, donc pas besoin de les payer. » Ma mère, qui d’habitude craint de ne pas avoir suffisamment d’argent, n’a pas mentionné que les frais d’expédition étaient plus chers que les oignons. Pour la première fois, je ne lui ai pas reproché que cela n’en valait pas la chandelle, car j’ai pu ressentir son attention et la chaleur familiale.
Cheng Shanyan • employée