La revue Dialogue Chine-France a pour principal objectif de rapprocher nos deux peuples : celui chinois et celui français. Dialogue Chine-France devient ainsi de facto le lieu de cette rencontre. Nous l’avons conçu comme un espace pour expliquer les ententes, les projets communs économiques, culturels, politiques.
En creux, Dialogue Chine-France permet aussi à la France de jouer un rôle majeur, en Europe, dans les relations sino-européennes. En mettant en évidence ses jumelages, ses entreprises qui ont réussi en Chine, la France permet un dialogue apaisé qui prolonge l’ouverture lancée par le Général De Gaulle (en 1964). Évidemment les relations sino-françaises sont bien plus anciennes. Mais cette reconnaissance officielle fait date dans l’histoire. Dialogue Chine-France met en lumière des éléments peu connus du grand public (comme, par exemple, les EPHAD français en Chine ou des précisions sur le marché intérieur chinois) et donne l'opportunité à des jeunes d’écrire leurs visions, leurs rêves, leurs observations. Autant de pistes que des entreprises françaises et européennes pourront suivre pour aller à la rencontre du marché chinois.
Des habitants de Chongqing célèbrent le 10e anniversaire de la liaison du train express Chine-Europe.
En cette période de pandémie, qui nous épuise, qui érode nos forces, c’est une prouesse que de réussir cette relation bilatérale. Nous souhaitons poursuivre nos efforts pour rassembler nos cultures et tisser des liens encore plus forts. Bâtir l’avenir, c’est travailler à unir nos forces, à ouvrir les marchés, à favoriser les échanges culturels, économiques, pédagogiques...
C’est dans ce contexte que nous consacrons ce numéro à l’Accord global sur les investissements Chine-UE. Évidemment, nous aurions souhaité que ce numéro soit une fête, qu’il soit le lieu où nous puissions nous réjouir de l’aboutissement de sept longues années de discussions, de recherches et de développement entre les deux parties. Pour le moment, les accords sont suspendus, mais ce n’est pas pour autant qu’il nous faudrait renoncer à sortir ce numéro. Nous voulons poursuivre nos efforts de transparence, pour montrer quels sont les intérêts de la Chine, de la France et évidemment de l’Europe à établir des liens plus forts. Car c’est tous ensemble que nous pourrons construire l’avenir.
Rappel du contexte de cet accord
Après sept années de discussion, le 30 décembre 2020, un accord « de principe » était présenté lors d’une visioconférence en présence du président chinois Xi Jinping, le président du Conseil européen Charles Michel, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, la chancelière allemande Angela Merkel, et le président français Emmanuel Macron. Cet accord était la promesse de l’ouverture du marché chinois aux entreprises européennes. D’ailleurs le président Emmanuel Macron avait rédigé un tweet en ce sens « le dialogue entre l’Europe et la Chine a été renforcé et rééquilibré ces dernières années. Il se poursuit ». Cela souligne l’importance des échanges entre l’Europe et la Chine. Cet accord n’est pas un traité de libre-échange mais il est la pierre de touche d’une plus grande intégration économique. C’est le début d’une interopérabilité des échanges. Selon les Échos, en décembre 2020, les investissements européens atteignaient 150 milliards d’euros en Chine et ceux chinois représentaient 113 milliards. L’accord d’investissement permet d’envisager de décupler ces stocks d’investissements.
Quelles sont les ambitions européennes ?
Au travers de cet accord, l’Europe gagne sur deux plans, d’une part, elle gagne une autonomie financière face aux autres puissances comme les États-Unis, la Russie, et, d’autre part, elle crée les conditions nécessaires à un rééquilibrage économique entre le marché chinois et celui européen.
D’un côté, cet accord rend accessible le marché européen (soit environ 450 millions d’habitants) et d’autre part, l’Europe peut enfin investir en Chine de façon plus libre avec moins de contraintes (un marché de plus d’un milliard d’habitants). C’est un modèle gagnant-gagnant puisqu’il offre aux deux parties de nouveaux débouchés et génère de nouvelles perspectives communes.
La boutique de lingerie de la marque néerlandaise Hunkemoller, à Shanghai, le 1er août 2020
Que signifie l’ouverture dumarché chinois ?
L’ouverture du marché chinois c’est une révolution, c’est un immense pas depuis le début de la politique d’ouverture de la Chine. En décembre 2020, Xi Jinping estime que l’accord « démontre la détermination de la Chine à promouvoir un haut degré d’ouverture » et que cet accord propose des « garanties institutionnelles plus fortes » et de « meilleures perspectives de coopération ».
L’écologie au cœur de cet accord sino-européen
En renforçant leur coopération, l’Europe et la Chine, au travers de cet accord, s’engagent sur la construction de la société de demain. Une société plus ouverte, plus inclusive, plus respectueuse de l’environnement.
En effet, nous l’avons montré dans deux numéros de Dialogue Chine-France (le N°3 et le N°5), l’écologie est une préoccupation commune à la Chine et à la France. Pour l’Europe, l’environnement doit être la priorité. Nous devons étudier ensemble les impacts de ces nouveaux échanges, envisager la construction de voies vertes entre nos deux pays, etc. Et c’est précisément ce que cet accord prévoit avec la mise en place d’un groupe de travail pour étudier les avancées faites dans le domaine du développement durable.
Construire, ensemble,le monde de demain
Bâtir le monde de demain, c’est analyser le présent en regardant les erreurs commises, c’est nous donner la possibilité de les corriger pour donner une chance aux futures générations de vivre dans une société apaisée, plus juste, plus solidaire, plus sociale et donc plus écologique.
Cet accord d’investissement peut servir de base à des négociations autour de « la Ceinture et la Route ». En effet, ouvrir le marché chinois aux entreprises européennes, c’est aussi leur donner la possibilité de participer à ce projet mondial. En d’autres termes, c’est permettre à l’Europe d’être au cœur d’une reconstruction de l’économie mondiale. C’est faire de l’Europe, le centre de nouvelles perspectives, d’une réflexion multilatérale. Cet accord, c’est l’acte de (re)naissance de l’Europe comme puissance. Cet accord est donc le pivot de la construction d’un nouveau modèle de gouvernance : le multilatéralisme des puissances.
SONIA BRESSLER:écrivaine et experte française sur la Chine